Derniers résultats d’une étude sur l’IVCC et la SP subventionnée par la Société canadienne de la SP

Contexte : Caractérisation d’un éventuel lien entre l’IVCC et la SP

Par « insuffisance veineuse céphalorachidienne chronique » (IVCC), on entend une affection caractérisée par un rétrécissement ou un blocage (sténose) des veines de la tête et du cou tels que celles-ci ne peuvent plus drainer efficacement le cerveau et la moelle épinière. Il a été avancé que l’obstruction de ces veines entraîne une augmentation du taux de fer dans le cerveau susceptible de déclencher les réactions auto-immunes à l’origine de la sclérose en plaques (SP). Le terme IVCC a été forgé par le Dr Paolo Zamboni, chirurgien italien spécialisé en médecine vasculaire qui, en 2009, a publié un article faisant état de la présence d’une IVCC chez de nombreuses personnes atteintes de SP. Cet article a suscité un vaste débat au sein de la collectivité de la SP, et depuis lors, nombre de chercheurs s’intéressent à la question de l’IVCC partout dans le monde.

En juin 2010, la National MS Society (États-Unis) et la Société canadienne de la SP ont affecté plus de 2,4 millions de dollars à sept nouveaux projets de recherche visant à mieux faire comprendre le lien qui pourrait exister entre l’IVCC et la SP. Les auteurs de ces études avaient pour but d’observer la structure et le fonctionnement du système veineux qui draine le cerveau et la moelle épinière chez des personnes atteintes de SP et de comparer les résultats obtenus à ceux de volontaires sains et de personnes atteintes d’autres maladies neurologiques que la SP.

Le Dr Jerry Wolinsky et ses collaborateurs du Centre des

sciences de l’Université du Texas à Houston ont été les premiers

à publier les résultats de leur étude sur l’IVCC. Selon ces

résultats obtenus par échographie standard, il n’y aurait pas de

lien entre l’IVCC et la SP. Soucieux d’approfondir leurs recherches, ils ont observé

le drainage du système veineux de la tête et du cou chez les mêmes

groupes de patients, mais en ayant recours cette fois à d’autres

techniques d’imagerie, afin de vérifier s’ils arrivaient aux mêmes

résultats que ceux qu’ils avaient obtenus par échographie.

Description de l’étude

L’étude en question a été menée dans un seul centre auprès de 206 personnes atteintes de SP et de 70 volontaires sains servant de témoins. L’équipe de recherche avait pour principal objectif de comparer ces deux groupes quant à la prévalence de l’IVCC, mise en évidence par neuroéchographie (échographie du cerveau).

Sur les 206 personnes atteintes de SP ayant subi une échographie, il y en a 98 qui ont été soumises à une phlébographie par résonance magnétique (PRM) 3D. Cet examen très poussé consiste à injecter un produit de contraste au patient afin d’obtenir des images détaillées des veines et d’observer la circulation du sang dans la tête et le cou.

Sur les 98 personnes atteintes de SP qui ont fait l’objet d’une échographie et d’une PRM, il y en a 40 qui ont également subi une phlébographie cathéter. Cet examen consiste à insérer un cathéter par voie chirurgicale dans la veine considérée afin de visualiser la lumière de celle-ci. Dans le cadre de cette étude, ce sont les veines jugulaires internes et la veine azygos qui ont été examinées, puisque c’est le rétrécissement ou le blocage de ces veines qui seraient le signe distinctif de l’IVCC.

Après quoi, les données recueillies par PRM et par phlébographie cathéter ont été comparées à celles qui avaient été obtenues par échographie chez ces patients.

Résultats

Phlébographie par résonance magnétique (PRM)
Sur les 98 personnes atteintes de SP qui ont subi une échographie et une PRM, il y en a 71 chez lesquelles ni l’échographie ni la PRM n’ont mis en évidence la présence d’une IVCC. De plus, il y en a 26 chez lesquelles les résultats de ces deux examens étaient contradictoires (l’un mettait en évidence des signes de sténose, alors que l’autre non). L’équipe de recherche a fait remarquer que ces différences pourraient être attribuables au fait qu’il est possible d’explorer par PRM certaines régions du système veineux qu’on ne visualise pas bien par échographie.

Phlébographie cathéter
Les chercheurs ont examiné en tout 39 veines azygos, et seule l’une d’entre elles avait légèrement rétréci. Environ la moitié des veines jugulaires internes étudiées présentaient des sténoses à des degrés très divers allant de 10 à 90 %. Cela dit, les résultats par phlébographie cathéter indiquent que ces sténoses, quel que soit leur degré de gravité, n’étaient guère significatives sur le plan clinique.

Dans l’ensemble, les données additionnelles recueillies dans le cadre de cette étude semblent infirmer l’hypothèse selon laquelle le système veineux des personnes atteintes de SP présenterait certaines anomalies. Qui plus est, elles portent à croire qu’il est peu probable que l’IVCC contribue à l’apparition de la SP.

Commentaires

Les dernières données tirées de l’étude du Dr Wolinksy viennent éclairer d’importantes questions relatives aux techniques d’imagerie utilisées pour le dépistage de l’IVCC. Dans la plupart des études portant sur l’IVCC et la SP, y compris dans les travaux du Dr Zamboni, c’est l’échographie que l’on a utilisée pour explorer le système veineux en détail. Cela dit, d’autres techniques permettent de déceler des anomalies de la structure du système veineux avec plus de précision que cette dernière. Les résultats des autres études ayant été subventionnées fourniront des données supplémentaires sur l’IVCC et le rôle qu’elle pourrait jouer chez les personnes atteintes de SP. Ils devraient être dévoilés dans les prochains mois.

Référence
Brod SA et coll. Chronic cerebrospinal venous insufficiency: makes multimodal imaging assessment. Multiple Sclerosis Journal 2013 4 July [Version électronique publiée avant la version imprimée]