L’infection par Helicobacter pylori pourrait diminuer le risque de sclérose en plaques chez la femme

Contexte

Des données récentes permettent de croire que l’accroissement de la fréquence des maladies auto-immunes, comme la sclérose en plaques, dans les pays développés peut être lié à la diminution du taux de maladies infectieuses dans ces pays. Plus précisément, un degré d’hygiène élevé (hypothèse de l’hygiène), l’utilisation répandue d’antibiotiques et une diminution de l’exposition à certains types d’infection durant l’enfance pourraient contribuer à l’apparition d’allergies et de maladies auto-immunes plus tard dans la vie.

Helicobacter pylori (H. pylori) est une bactérie présente dans l’estomac humain, qui touche pratiquement la moitié de la population mondiale. Or, les taux d‘infections par cette bactérie n’ont cessé de diminuer dans les pays développés. Soulignons que la plupart des personnes infectées par H. pylori ne présentent aucun symptôme, bien que l’infection soit liée à certains troubles comme l’ulcère d’estomac et la gastrite chronique. Des études récentes laissent supposer qu’une infection par H. pylori contractée durant l’enfance pourrait, en fait, assurer une protection contre certaines maladies auto-immunes comme la SP.

Une étude menée en Australie, dont les auteurs avaient pour but de déterminer si l’infection par H. pylori permet de réduire le risque de SP, a été présentée dans la revue Journal of Neurology, Neurosurgery & Psychiatry par le Dr Allan Kermode et ses collaborateurs.

Description de l’étude

Les chercheurs ont recruté 550 personnes atteintes de SP et 299 témoins (sujets sains). Des échantillons sanguins de tous les participants ont fait l’objet de tests de dépistage des anticorps contre H. pylori. Par ailleurs, les participants atteints de SP ont subi un examen neurologique visant à mesurer certains paramètres cliniques, dont l’âge de la personne à l’apparition des premiers symptômes de SP, la durée de la maladie et son évolution clinique, la fréquence des poussées et le score obtenu selon l’EDSS ‒ échelle élaborée d’incapacités de Kurtzke.

Résultats

Aucun lien n’a été établi entre l’infection par cette bactérie et le risque de SP chez les hommes qui participaient à l’étude. Toutefois, l’étude a révélé que la survenue d’une infection par H. pylori était plus faible chez les participantes atteintes de SP que chez les témoins en santé, ce qui donne à penser que l’infection par H. pylori pourrait protéger les femmes contre la SP. Les chercheurs ont également découvert une association entre l’infection par H. pylori et la forme progressive primaire de SP chez la femme. À cet égard, il est intéressant de noter que le taux de survenue de ce type d’infection était plus élevé chez les femmes atteintes d’une forme progressive primaire de SP. Enfin, bien qu’aucune relation n’ait été établie entre l’infection par H. pylori et la fréquence des poussées de SP, l’absence de signes d’infection par cette bactérie était associée à un score EDSS accru chez les participantes atteintes de SP que chez les autres participants.

Commentaires

Il s’agit ici de la plus vaste étude jamais effectuée sur l’association entre l’infection par H. pylori et le risque de SP. Selon les résultats obtenus, il est possible que cette infection puisse protéger les femmes contre le risque de SP. En outre, elle étaye certaines observations suivant lesquelles des infections contractées durant l’enfance pourraient prévenir l’apparition d’allergies et de maladies auto-immunes plus tard dans la vie, phénomène expliqué par l’hypothèse de l’hygiène. Bien que cette étude ne révèle rien d’autre qu’un lien entre l’infection par H. pylori et le risque de SP, les auteurs avancent que cette infection peut influer sur le système immunitaire durant une étape importante du développement de l’enfant et diminuer du coup le risque que certains types de cellules immunitaires entraînent l’auto-immunité. Certaines questions demeurent cependant sans réponses : pourquoi l’infection par H. pylori protégerait-elle les femmes et non les hommes? Pourquoi cette infection est-elle surtout associée à la forme progressive primaire de SP? Il faudra poursuivre la recherche dans ce domaine pour mieux comprendre et définir le rôle potentiel que pourrait jouer H. pylori en tant que facteur de protection contre la SP.

Source

PEDRINI, M. J. F.  et coll. « Helicobacter pylori infection as a protective factor against multiple sclerosis risk in females », J Neurol Neurosurg Psychiatry, 2015 (publication en ligne avant impression).